Entendre l’appel de la dignité
Bientôt sera discuté au Parlement le projet de loi relatif à la bioéthique. Il concerne chacun de nous. Il met en jeu une certaine idée de l’homme et de sa dignité. C’est pourquoi les évêques, réunis prochainement à Lourdes, en discuteront ensemble.
La dignité humaine est un appel qui ne peut être étouffé. La protéger chez tous et en toutes circonstances est la vocation de nos lois. Elle est un cri quand justice et liberté sont bafouées. Elle demeure un appel puissant mais silencieux chez les plus vulnérables. Leur simple présence en est l’écho. Heureuse la société qui l’entend et qui, lui répondant, voit surgir d’elle-même des trésors de solidarité et de respect !
Entendre l’appel de la dignité, c’est promouvoir le consentement libre et éclairé. Pour cela, le projet de loi ouvre les voies d’une information plus complète avant et après les examens visant à déceler une anomalie génétique sur l’adulte ou l’enfant à na ître. L’information sera conforme à la dignité si elle conduit au regard juste sur le handicap.
Entendre l’appel de la dignité, c’est mettre au centre « l’intérêt de l’enfant à na ître »(1) . C’est pourquoi, le projet de loi maintient l’interdiction de l’Assistance Médicale à la Procréation (AMP) post mortem et propose la levée de l’anonymat pour les enfants issus de l’AMP avec donneurs. Mais cette technique suscite tant de problèmes qu’il est juste de se demander si elle respecte l’intérêt de ces enfants : seraient-ils d’accord pour que soit délibérément dissociée leur filiation génétique de leur filiation affective ? Les enfants adoptés ne disent-ils pas merci à leurs parents ?
Entendre l’appel de la dignité, c’est s’engager dans la recherche scientifique pour vaincre l’infertilité médicale, trouver des thérapies et guérir le handicap. Par exemple, les thérapies à partir des cellules du sang de cordon ombilical sont une belle réponse. Le projet de loi reconna ît qu’elles sont une ressource thérapeutique si elles sont données, à l’instar du beau don d’organes.
Entendre l’appel de la dignité, c’est ne pas céder aux tentations auxquelles expose l’étonnant silence de l’embryon humain. C’est dépasser le regard scientifique qui ne peut y reconna ître qu’un « amas de cellules », ce que nous sommes tous, mais pas seulement, loin s’en faut ! C’est ne pas entrer dans la « ruse de l’esprit »(2) qui invente des distinctions « arbitraires »(3) entre in utero ou in vitro, entre « préembryon » et « embryon ». C’est reconna ître le continuum interne du développement embryonnaire et le passage par des seuils vitaux de celui qui ne peut devenir humain s’il ne l’est pas déjà. C’est considérer l’ensemble de notre droit qui, de façon cohérente, interdit l’utilisation de la vie d’un être humain pour le bien d’autres êtres humains. C’est faire les choix politiques, sans les mesurer au seul aspect financier, de moyens supplémentaires pour les recherches scientifiques menées dans le respect de la dignité humaine. Le projet de loi change l’esprit de notre droit en ouvrant, dans des conditions peu restrictives, la possibilité permanente de détruire de façon délibérée des embryons humains pour la recherche.
Par ses choix en bioéthique, la France entendra-t-elle complètement l’appel de la dignité ? Elle peut encore une fois être au rendez-vous de l’histoire pour redire l’intangible dignité « de tout être humain dès le commencement de sa vie »(4).
Texte paru dans Ouest-France, le 2 novembre 2010
(1) : Proposition n°4, Rapport parlementaire, janvier 2010.
(2) : Catherine Labrusse-Riou, juriste.
(3) : Alain Clayes, Rapport parlementaire, juin 2001.
(4) : Code civil, art. 16.
L’Assemblée plénière des évêques de France s’est donc ouverte hier jeudi à Lourdes. Je joins à cet article le discours d’ouverture prononcé par le cardinal André Vingt-Trois, président de la Conférence des évêques de France.